Découvrir J.R.R. Tolkien : questions / réponses

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Un auteur à découvrir, à lire et à relire

John Ronald Reuel Tolkien est un auteur à part dans la littérature contemporaine, en raison de son impressionnant succès, des millions de lecteurs qui dans le monde entier connaissent Le Seigneur des Anneaux (1954-1955), Le Hobbit (1937) ou Le Silmarillion (publié par son fils Christopher en 1977), mais aussi de son influence déterminante dans la genèse d’œuvres littéraires ou cinématographiques : il est souvent considéré comme le père de la Fantasy moderne, George Lucas s’est inspiré de lui pour La Guerre des étoiles et il a été déterminant dans la naissance des jeux de rôles (Donjons Dragons en tête), sans oublier des phénomènes de société (comme la contre-culture américaine dans les années 1960) et son influence sur l’écologie moderne.
Cette dimension internationale trouve d’ailleurs un écho dans l’ampleur phénoménale des adaptations cinématographiques réalisées par Peter Jackson, qui ne se mesure pas seulement à la démesure du budget, le plus important accordé à un film (en trois parties) dans l’histoire du cinéma, pour sa première trilogie (2001-2003)… en attendant la série produite par Amazon en 2022.

Toutefois, J.R.R. Tolkien est également l’objet de malentendus : on pense à la polémique qui s’est déclenchée lorsque Le Seigneur des Anneaux a été élu « livre du siècle » au Royaume-Uni, ou encore à des articles dans la presse (américaine principalement), qui l’accusent – par ignorance – d’être simpliste, voire réactionnaire. Cette réputation inquiète encore bon nombre de lecteurs, qui sont aussi rebutés par la longueur de certains textes ou par sa réputation d’auteur « pour enfants » ou « de Science Fiction ». L’objet de cette page est d’inviter à dépasser ces obstacles, qui empêchent des lecteurs potentiels de connaître un des plus grands plaisirs que la lecture d’un roman puisse donner … de l’avis des défenseurs de J.R.R. Tolkien. Quant à ceux-ci, ils trouveront ici des suggestions de lecture, une présentation d’autres textes, qu’il ne connaissent pas forcément… puisque Le Seigneur des Anneaux, la plus célèbre de ses œuvres, n’est que la partie émergée de l’iceberg !
Vincent Ferré


[Dossier réalisé pour une librairie en ligne en 2001, mis à jour en août 2022]

Sommaire

  • Qui est J.R.R. Tolkien (1892- 1973) ?
  • FAQ : Tolkien est-il un auteur pour enfants ? Pourquoi avoir choisi de créer un monde merveilleux ? Est-il vrai qu’« il n’y pas de femmes » dans Le Seigneur des Anneaux ? Qu’en est-il des accusations de racisme dont il est l’objet ? etc.
  • Le Seigneur des AnneauxLe HobbitLe Silmarillion… que lire de Tolkien ? dans quel ordre ?

Qui est J.R.R. Tolkien(1892- 1973) ?

Un auteur fécond et discret

Sa vie, John Ronald Reuel Tolkien semble l’avoir en grande partie consacrée à la littérature et aux langues, depuis ses premiers poèmes parus en 1911 (il a dix-neuf ans) puis la naissance de sa « mythologie » pendant la Première Guerre, jusqu’à sa mort, en 1973. Cet auteur demeure souvent caché derrière son œuvre, ce qui est conforme à la discrétion dont il a toujours fait preuve, préférant enseigner, s’occuper de ses recherches universitaires ou de sa famille… et, bien entendu, écrire : Le HobbitLe Seigneur des Anneaux, ainsi que les textes qui publiés après sa mort par son fils Christopher dans Le Silmarillion, les douze volumes de l’« Histoire de la Terre du Milieu » (Le Livre des contes perdus, Les Lais du BeleriandLa Formation de la Terre du Milieu…), jusqu’à La chute de Gondolin : raconter la vie de J.R.R Tolkien, revient, dans une large mesure, à énumérer la liste des œuvres qu’il a écrites, mais rarement publiées de son vivant.

Les années de formation (1892-1917)

Né le 3 janvier 1892 dans l’Etat Libre d’Orange (aujourd’hui en Afrique du Sud), à Bloemfontein de parents anglais, J.R.R. Tolkien rentre à l’âge de trois ans en Angleterre. Son enfance, passée dans la région de Birmingham, est marquée par la mort de son père (1896) puis celle de sa mère (1904), par les impressions qu’il reçoit des lieux qui l’entourent, ainsi que par la naissance de son goût pour les langues, réelles ou imaginaires. Après des études à Oxford (1911-1915), de latin-grec puis de littératures et de langues anglaise et germaniques, il épouse Edith Bratt, qu’il a rencontrée en 1908, puis s’engage dans l’armée et prend part aux combats dans la Somme, dans les tranchées. Malade, rapatrié en Angleterre, il commence à écrire Le Livre des Contes perdus pendant l’hiver 1916-1917, ouvrage qu’il abandonne trois ans plus tard mais qui marque la naissance des histoires du futur « Silmarillion ».

Les premiers textes et Le Hobbit (1916-1937)

Après avoir travaillé à Oxford en 1918, où il participe à la rédaction de l’Oxford English Dictionary, J. R. R. Tolkien est élu à l’université de Leeds. Trois fils sont nés en 1917 (John), 1920 (Michael) et 1924 : c’est à Christopher, le plus jeune, qu’est dédié Le Seigneur des Anneaux, et c’est lui qui éditera Le Silmarillion, les Lettres (avec H. Carpenter), les douze volumes de « L’Histoire de la Terre du Milieu », mais aussi Les Enfants de Húrin, Beren & Lúthien… plus de vingt livres au total.

Pendant ces années 1917-1936, J.R.R. Tolkien commence plusieurs textes qu’il n’achève pas mais qui servent de sources au Silmarillion et sont publiés, après sa mort, dans « L’Histoire de la Terre du Milieu » : le Lai des Enfants de Húrin (dans Les Lais du Beleriand), La Fuite des Noldoli, le Lai d’Eärendil et le Lai de la Chute de Gondolin. Parallèlement, ses publications universitaires (un lexique de moyen anglais, une édition de Sire Gauvain et le chevalier vert avec E.V. Gordon, etc.) lui valent d’obtenir dès 1925 un poste à Oxford, où il enseigne d’abord l’anglo-saxon puis la littérature et la langue anglaises jusqu’à sa retraite, en 1959.

Entre 1925 et 1937, années marquée par la rencontre de C.S. Lewis et la naissance de son dernier enfant, Priscilla (en 1929), il écrit des versions successives de textes comme le Lai de Leithianl’Esquisse de la Mythologie et la Quenta Noldorinwa (publiés dans La Formation de la Terre du Milieu), les Annales du Beleriand et Annales du Valinor, l’Ambarkanta, le Lhammas, la Quenta Silmarillion et les Etymologies, rassemblés dans La Route Perdue  ; il travaille énormément à l’université, poursuivant des travaux importants (en particulier sur Beowulf) ; mais l’année charnière est 1937, lorsque paraît Le Hobbit, qui devient un best-seller de la littérature de jeunesse, ce qui va conditionner pendant longtemps l’image que l’on se fera de J.R.R. Tolkien… et que naît le premier chapitre d’une « suite ».

La réalisation du « chef d’œuvre », Le Seigneur des Anneaux, 1937-1954

En réponse à son éditeur qui l’invitait à donner une « suite » au Hobbit, J.R.R. Tolkien entreprend en effet, fin 1937, la rédaction de ce qui deviendra Le Seigneur des Anneaux, roman qui lui demande quatorze ans de travail ; cela ne l’empêche pas d’écrire un essai sur les contes de Fées (publié en français dans Les monstres et les critiques ainsi que dans Faërie et autres textes, avec « Le Retour de Beorhtnoth » et Feuille, de Niggle), mais aussi les Notion Club Papers, de publier divers livres dont Le Fermier Gilles de Ham (1949), et de retravailler des textes antérieurs, encore et encore.

La gloire et les dernières années (1955-1973)

Lorsque Le Seigneur des Anneaux paraît, en 1954-1955, J.R.R. Tolkien achève sa carrière universitaire ; mais la publication de ce texte ne bouleverse pas immédiatement son existence : ce n’est que dix ans plus tard – il a publié entre temps les Aventures de Tom Bombadil (1962 ; repris en français dans Faërie et autres textes) puis Tree and Leaf (1964) -, que paraissent des éditions américaines en poche de son grand roman et que commence le « phénomène Tolkien », d’une ampleur stupéfiante. L’auteur n’a plus que quelques années à vivre et s’éteint à Bornemouth le 2 septembre 1973. C’est à ce moment-là que commence le travail de son fils Christopher, qui a édité les manuscrits de son père pendant 40 années : paraissent, en particulier, Le Silmarillion en 1977, Les Contes et légendes inachevés (1980) – Les Lettres du Père Noël (1976) étant éditées par sa femme Baillie – , le volume d’essais intitulé Les Monstres et les critiques, les 12 volumes de L’Histoire de la Terre du Milieu… avant Les Enfants de Húrin (2007),  des textes d’inspiration explicitement médiévale (La Légende de Sigurd et GudrúnLa Chute d’Arthur, Beowulf. Traduction et commentaire ), jusqu’à ses derniers ouvrages, Beren & Lúthien et La chute de Gondolin, deux ans avant sa disparition en janvier 2020.

Pour en savoir plus : la biographie de H. Carpenter (J.R.R. Tolkien, une biographie) est préférable à d’autres, son auteur ayant eu accès à de nombreux documents ; mais la meilleure lecture demeure celle des Lettres de J.R.R. Tolkien, pour approcher l’auteur et l’homme.

Présentation des livres : que lire de J.R.R. Tolkien ?

Pour découvrir Tolkien : (les dates indiquées sont celles de la parution en anglais)

Le Seigneur des Anneaux (1954-1955)

Le voyage plein de dangers de Frodo et ses compagnons vers le Mordor, où doit être détruit l’Anneau, avant que le Seigneur des Anneaux le retrouve. Un récit passionnant, un choc pour des générations de lecteurs, une histoire de 1000 pages… agrémentée de cartes, qui mêle descriptions stupéfiantes d’un monde imaginaire et de ses peuples, des personnages attachants. La langue originale, dans le texte anglais, est somptueuse. Une nouvelle traduction française, par Daniel Lauzon, a été publiée en 2014-2016 aux éditions Bourgois. A partir de 13-15 ans (âge indicatif)

Le Hobbit (1937)

Un Hobbit entraîné par des Nains et un magicien dans une aventure étourdissante, à la recherche d’un trésor gardé par un dragon : échappera-t-il aux Gobelins et aux Trolls ? Quelles découvertes fera-t-il chez les Elfes ? Qui est Gollum, et à quoi sert cet anneau ? Et que faire, lorsqu’on est si petit, dans un monde si surprenant ? Un conte pour enfants, qui plait également aux adultes par sa vivacité et son atmosphère.
Une nouvelle traduction française, par Daniel Lauzon a été publiée en 2012 aux éditions Bourgois. A partir de 8 ans et plus (âge indicatif ; on peut lire ce récit à des enfants de 5 ou 6 ans)

Le Silmarillion (1977)

Quatre années seulement après la mort de John Ronald Reuel Tolkien, son fils Christopher Tolkien publie, en 1977, un ensemble de légendes et de récits qui retracent les premiers Âges de l’univers de la Terre du Milieu, ce monde dans lequel prennent place Le Seigneur des anneaux et Le Hobbit. « Edité » par Christopher Tolkien, Le Silmarillion raconte la création de cet univers, à travers des chapitres très variés, ce qui garantit que de nombreux lecteurs qui ne connaissent pas encore Tolkien peuvent s’y retrouver. Cette fresque prenante, où se multiplient les affrontements entre Ainur, ou Elfes et Humains contre Morgoth puis Sauron, met en perspective Le Seigneur des Anneaux, l’aboutissement du cycle. L’édition illustrée par Ted Nasmith, parue en 2021, propose la nouvelle traduction de Daniel Lauzon. Lire la suite.

Les Enfants de Húrin (2007)

Le livre, édité par Christopher Tolkien, qui a fait événement. Des milliers d’années avant Le Seigneur des Anneaux, la Terre du Milieu est en proie aux luttes entre Morgoth, le premier Seigneur Ténébreux, et les Elfes, alliés aux Hommes. C’est contre Túrin et Niënor, les enfants de Húrin, que Morgoth va lancer une terrible malédiction, les contraignant à une vie malheureuse et errante, pour se venger du héros qui a osé le défier.
Les Enfants de Húrin, œuvre entreprise par Tolkien au cours de la Première Guerre mondiale, s’adresse d’une part aux lecteurs du Seigneur des Anneaux, qui retrouveront le souffle de ce roman dans l’histoire de Túrin, héros humain qui cherche sa place parmi les Elfes et les Hommes dans un monde en guerre ; trompé par le destin, il lutte de manière spectaculaire et tragique contre Morgoth, nous faisant découvrir un passé méconnu de la Terre du Milieu. Mais il plait aussi à ceux qui n’ont jamais lu d’oeuvres de JRR Tolkien.

Lettres de J.R.R. Tolkien (1981)

Une mine pour les amateurs de Tolkien ou ceux qui veulent découvrir cet auteur : ces lettres, qui datent de 1914 à sa mort, permettent de suivre pas à pas la naissance de son œuvre, de trouver des réponses aux nombreuses interrogations que se pose tout lecteur (puisque Tolkien répond à des questions capitales) et de découvrir un auteur attachant, prodigieusement intelligent, doté d’une détermination et d’un humour inaltérables.

Pour ceux qui veulent en savoir plus :

Faërie et autres textes (1974 ; nouvelle édition en 2003)

Contient des textes brefs (Gilles de HamSmith de Wootton Major et le remarquable Feuille de Niggle) précédant un essai sur les « Contes de fées » qui expose les théories de l’auteur du Seigneur des Anneaux sur la littérature et le merveilleux. La nouvelle édition (qui remplace le volume Faërie) contient « Le Retour de Beorhtnoth » et le poème « Mythopoeia », avec Les Aventures de Tom Bombadil (1962) – dans des traductions revues et augmentées. Les Aventures de Tom Bombadil est un recueil de poèmes qui permet de découvrir une autre facette de J. R. R. Tolkien, contient « Les Aventures de Tom Bombadil », « Fastitocalon », « Le dernier vaisseau », etc.

La naissance de l’œuvre de Tolkien :

Contes et Légendes inachevés (1980)

Christopher Tolkien poursuit l’édition de nombreux manuscrits de son père, dans ce livre qui regroupe des textes sur les enfants de Húrin, l’île de Númenor, Galadriel et Celeborn, les Istari et les Palantíri, ou sur l’amitié entre le Rohan et le Gondor, etc. C’est dans ce volume qu’il met au point la méthode de publication des œuvres de son père qu’il appliquera dans « L’Histoire de la Terre du Milieu » ; mais pour le grand public, ce recueil offre à lire comme des « chapitres supplémentaires » du Silmarillion. A la rentrée 2022, la traduction de Tina Jolas, révisée par Pauline Loquin, paraît aux éditions Bourgois dans une édition illustrée par le trio Alan Lee-John Howe-Ted Nasmith !

« L’Histoire de la Terre du Milieu » (1983-1996)

L’œuvre maîtresse de Christopher Tolkien comprend douze volumes présentant, chronologiquement, les textes écrits par J.R.R. Tolkien sur plusieurs décennies : ces derniers racontent la création du monde qu’il a inventé, et présentent des versions successives des récits et textes appelés à former « Le Silmarillion », jamais paru du vivant de J.R.R. Tolkien – mais aussi les premières versions du Seigneur des Anneaux. Un ensemble stupéfiant, d’une lecture parfois un peu exigeante ; les deux premiers tomes ont été traduits en français par Adam Tolkien sous le titre du Livre des Contes perdus I et II ; les trois suivants par Daniel Lauzon (Les Lais du Beleriand et La Formation de la Terre du Milieu), puis La Route Perdue en attendant, en 2023, La Défaite de Sauron. Vers la fin de sa vie, Christopher Tolkien a fait paraître des anthologies de ces textes, sans les notes et commentaires d’origine, sous les titres Beren & Lúthien et La chute de Gondolin.

Réécritures nordiques et arthuriennes

La Légende de Sigurd et Gudrún, 2009
La Chute d’Arthur, 2013
Beowulf, traduction et commentaire, 2015

Pour les enfants :

Les Lettres du Père Noël (1976)

A partir de 1920, pendant vingt ans, J.R.R. Tolkien écrit chaque année à ses enfants une lettre de la part du Père Noël, accompagnée d’illustrations : elles racontent la vie au Pôle Nord, les aventures du Père Noël et de ses compagnons (l’Ours, les Elfes), ainsi que les problèmes que leur posent les Gobelins. A bien des égards, ce livre annonce Le Hobbit.

Roverandom (1999)

Ce conte – une des nombreuses histoires qu’inventa Tolkien pour ses enfants – relate les aventures d’un petit chien, transformé en jouet par un magicien… Le volume contient quelques illustrations de la main de l’auteur

Tolkien illustrateur

Peintures et aquarelles de J.R.R. Tolkien, nouvelle édition, 2022

Contient entre autres des illustrations du Hobbit par Tolkien, des dessins destinés à illustrer Le Seigneur des Anneaux (la Lorien, la Gorge de Helm, etc.) ou se rapportant au Silmarillion, qui ont paru dans des Calendriers entre 1973 et 1979.

Wayne G. Hammond et Christina Scull, J.R.R. Tolkien : Artiste Illustrateur (1996)

Ce recueil se veut plus large que les Peintures et aquarelles, et comprend – outre les illustrations du Hobbit ou relatives au Seigneur des Anneaux mentionnées plus haut -, des œuvres de jeunesse de J.R.R. Tolkien (des paysages anglais), les illustrations des premières légendes, des dessins pour ses enfants, etc. – à l’encre, au crayon ou à l’aquarelle.

Tolkien l’universitaire :

Les Monstres et les critiques et autres essais (1983)

Des textes éclairants, sur BeowulfSire Gauvain, le goût de Tolkien pour les langues et leur invention, ainsi qu’un discours prononcé à Oxford, qui révèle des aspects méconnus de cet auteur en proposant un bilan de sa carrière universitaire.

Sir Gawain and the Green Knight, Pearl and Sir Orfeo (1975)

Des texte médiévaux traduits par J.R.R. Tolkien, sa version de Sir Gawain… ayant d’ailleurs été diffusée par la BBC en 1953.

Enregistrements de Tolkien

Il existe divers enregistrements de textes lus par l’auteur :

J.R.R. Tolkien reads The Hobbit and The Lord of the Rings, New York, Caedmon, 1999, 50 min.

The Lord of the Rings, performed by J.R.R. Tolkien, New York, HarperCollins, 1998, 45 min.


Foire aux questions

  • J.R.R. Tolkien est-il un auteur pour enfants ?
  • Le choix du merveilleux
  • Les sources de J.R.R. Tolkien
  • L’importance des langues, réelles et inventées
  • Est-il vrai qu’« il n’y pas de femmes » dans Le Seigneur des Anneaux ?
  • Tolkien est-il un auteur réactionnaire, voire raciste ?
  • Le Seigneur des Anneaux, une allégorie ?

J.R.R. Tolkien est-il un auteur pour enfants ?

J.R.R. Tolkien a inventé un univers particulièrement cohérent, avec ses langues et ses légendes, et Le Seigneur des Anneaux est manifestement un roman pour adultes, de tous âges ; même si de bons lecteurs peuvent le découvrir assez jeunes (avant quinze ans) et apprécier l’histoire, cette œuvre se révèle de plus en plus intéressante au fil des relectures, et accompagne toute une vie de lecteur. En revanche, Tolkien a également imaginé des contes pour ses enfants, comme Le HobbitLes Lettres du Père Noël et Roverandom, ce qui explique la réputation d’« auteur pour enfants » que peut parfois avoir J.R.R. Tolkien.

Pourquoi avoir choisi de créer un monde « merveilleux » ?

L’invention de langues imaginaires a précédé, chez Tolkien, celle d’un monde où les êtres parleraient ces langues ; d’autre part, J.R.R. Tolkien a envisagé d’autres formes d’écriture avant d’opter pour le merveilleux, ce qu’il a fait afin de montrer au lecteur son propre monde, la Terre, sous des dehors inhabituels, comme à travers un « filtre », et de l’amener ainsi à réfléchir sur ses beautés et ses dangers. Ce choix est un choix esthétique, pas une facilité ni une « preuve » de puérilité de son texte, pas plus qu’un simple désir « d’évasion » au sens réducteur du terme.

Quelles sources se trouvent à l’origine de son œuvre ?

Cette question est très complexe et suscite beaucoup de débats. Parmi les sources évidentes se trouvent les traditions nordiques (islandaises, finlandaises, etc.) du Kalevala et des Eddas, le poème héroïque Beowulf, la tradition médiévale arthurienne… cependant, J.R.R. Tolkien a également été marqué par la lecture de Shakespeare et de textes classiques (Homère) ou plus récents, comme ceux de William Morris, au XIXe siècle, sans oublier certains de ses contemporains, classés dans les « littératures de l’imaginaire ».

Les langues, réelles et imaginaires

J.R.R. Tolkien était un linguiste exceptionnel, puisqu’il connaissait parfaitement le latin, l’anglo-saxon, le grec, le gotique, ainsi que le finnois, le russe, l’italien, le français, l’espagnol… Il s’est mis très tôt à inventer des langues à son tour, les plus abouties étant le quenya et le sindarin, parmi la cinquantaine de langues qu’il a développées ou envisagé de développer. Dans son œuvre, les langues possèdent une importance capitale : l’invention des langues va de pair avec celles de la géographie et des histoires.

Est-il vrai qu’« il n’y pas de femmes » dans Le Seigneur des Anneaux  ?

L’absence apparente de femmes est à la fois dictée par les modèles médiévaux du Seigneur des Anneaux et un signe du déclin de la Terre du Milieu, où plusieurs peuples ne font plus que survivre. Une lecture attentive révèle toutefois que, tout au long du récit, les femmes sont les inspiratrices des personnages et se trouvent à l’origine de leurs actions : c’est particulièrement net dans le cas d’Aragorn, qui veut se montrer digne d’Arwen, mais aussi dans la relation entre Gimli et Galadriel. Et la fin du texte montre que c’est sous leur égide que le monde renaît, que la végétation reprend ses droits, que la vie efface les traces des destructions. Les lecteurs et lectrices du Silmarillion découvriront que le plus grand des héros, chez lui, est une héroïne.

Tolkien est-il un auteur réactionnaire ?

J.R.R. Tolkien est parfois accusé de racisme, sous prétexte que certains personnages seraient de grands guerriers blonds… Il s’agit d’un contre-sens fondé sur certaines adaptations visuelles et cinématographiques de son oeuvre, sans oublier les jeux de rôles et les jeux vidéo. Les valeurs prônées par Tolkien dans ses lettres, et celles défendues par les personnages positifs, dans ses fictions, se trouvent à l’opposé de ce qu’on veut parfois lui faire dire : toute son œuvre défend la tolérance, le respect d’autrui et des différences, l’amitié entre les peuples. Chaque peuple possède des qualités et des défauts, et représente une facette de l’homme. Il n’est pas étonnant qu’existent des tentatives de « récupération » d’un auteur aussi célèbre et influent, même si elles sont souvent diamétralement opposées et incompatibles ; ce problème est lié à la question des interprétations symboliques de son oeuvre.

Le Seigneur des Anneaux , une allégorie ?

Au moment de sa parution, des critiques ou des journalistes se font l’écho d’une idée fausse sur Le Seigneur des Anneaux : ce récit serait une allégorie de la deuxième Guerre Mondiale, Sauron jouant le rôle de Staline ou de Hitler… là aussi, il suffit de lire ce roman pour se rendre compte qu’il n’en est rien. J.R.R. Tolkien a volontairement situé son œuvre dans un temps « mythique » pour lui donner une portée universelle, sans qu’on la réduise à tel ou tel événement, qui est d’ailleurs postérieur à la naissance des premières légendes du Silmarillion, auxquelles Le Seigneur des Anneaux est intimement lié. Le lecteur est libre de rapprocher l’histoire du Seigneur des Anneaux d’événements historiques dont il est, lui, le contemporain, mais sans pour autant réduire l’œuvre de Tolkien à n’être qu’une image de ces faits.