Nathalie Dufayet – Introduction

par Gelydrihan
Maîtrise

Nathalie Dufayet, Du temps biblique au temps mythico-poétique : discours et écriture de la création continuée chez J.R.R. Tolkien (maîtrise en LGC, Poitiers, 2002)

« La conservation d’une chose n’est pas produite par Dieu comme une cause totale, mais elle requiert de la part de la créature une aptitude à la conservation et une vertu pour ainsi dire conservatrice. »
Bonaventure
« Pas de structure sans conscience structurante. »
Jean Starobinski

Pour un néophyte, l’imaginaire tolkienien peut sembler de prime abord comme un univers avant tout empli d’échos au merveilleux médiéval. Ce critère touche généralement le public enfantin à travers des thèmes et des personnages stéréotypés tels que : la lutte du Bien contre le Mal, les combats, singuliers ou non, contre de terrifiantes créatures maléfiques, les chevaliers héroïques et leurs Dames, rarissimes mais toutes superbes. On trouve aussi des interventions de personnages initiés aux arts « magiques », des créatures mystérieusement liées à la Nature dans toute sa force et puissance, le triomphe final des forces du Bien, etc. De plus, à l’instar des œuvres de Chrétien de Troyes par exemple (Lancelot, Perceval…), le texte se compose essentiellement d’une structure linéaire, depuis une situation initiale donnée, qu’un élément perturbateur vient déséquilibrer avant que les héros ne parviennent finalement à réinstaurer l’ordre. Mais sous la linéarité apparente de ces textes se cache un système binaire. Le texte se compose en réalité d’une dynamique narrative reposant sur des alternances. Elles se situent entre les chevauchées et les repos, entre les épisodes guerriers, épiques, et les épisodes de réflexion, de dialogues. Ces derniers soulignent en fait l’aspect symboliques des événements ou la « psychologie » des personnages (nettement moins importante). Ces alternances servent essentiellement à faire émerger un signe initiatique, au sens où le déplacement physique représente le mouvement vers la connaissance de soi et vers celle de sa quête. C’est pourquoi les épisodes les plus importants, les plus riches de sens sont les passages « calmes » et non guerriers – qui exaltent la qualité chevaleresque des héros.
Tolkien a recours avant tout à une littérature « féérique » qui met en scène un décor imaginaire extraordinaire, où évoluent des êtres tels que les elfes, les ondines (Baie d’Or, épouse de Tom Bombadil et fille de la Rivière), les monstres ou les démons (cavaliers noirs, orcs, gobelins…). Ont ainsi couramment lieu sortilèges, miracles, maléfices et métamorphoses. L’onirisme guide alors tous ces mouvements et touche tous les objets de ce que Tolkien nomme son « Monde Secondaire » – qui appartiennent également au monde « primaire » figurant le notre (ciel, êtres, arbres, montagnes, plantes, animaux, cours d’eau,…). Ce recours systématique à l’onirisme crée donc cette atmosphère irrationnelle par excellence, atmosphère de « rêve », proprement « enchanteresse ». C’est le premier visage du dépaysement littéral qu’instaure l’œuvre tolkienienne, avec ses îles enchantées, ses arbres mouvants, éprouvant et parlant, ses animaux qui communiquent avec des figures « humaines » exceptionnelles – sont inclus les hommes et, surtout, les Elfes et les « Magiciens ».
Les moyens formels employés par Tolkien peuvent eux aussi paraître pour le moins « simples », au mieux « efficaces », notamment l’accentuation forte pour certains, excessive pour d’autres, de la beauté et de la laideur des forces du Bien et des forces du Mal. Mais force est de constater que l’auteur possède un art particulier de la description, notamment dans celle de l’étrangeté foncière des êtres, des lieux et édifices qu’il présente au lecteur. Le résultat optimum est la création aboutie de créatures idéales, qui cristallisent notre sensibilité. Le secret de l’Enchantement tolkinien repose avant tout sur l’elfo-centrisme de son imaginaire, de son Legendarium . Pour ces raisons, le lectorat contemporain, et postérieur, a souvent associé ce recours à l’irréel à un symbolisme moral incontournable. Il a ainsi réduit les créations de l’auteur à de simples allégories, figurant globalement la lutte du Bien contre le Mal. Le contexte historique d’après-guerre ne pouvait que contribuer à cette globalisation facile : la mise en scène effective du texte d’une opposition forte entre liberté et fatalité enchaîna l’œuvre au contexte de l’immédiat après-guerre, tension paroxystique du XXème siècle. Pourtant, le Seigneur des Anneaux, et davantage le Silmarillion, apparaissent sous un autre visage. Ils dépassent cette réduction dès l’instant que l’esprit cesse d’appartenir, pour un temps [de lecture], au monde primaire, à la réalité physique, matérielle, chronologique, quotidienne du lecteur. C’est là qu’intervient dans toute sa force la caractérisation des personnages et des lieux. Ils sont en réalité les références explicites d’un passé révolu, celui du Moyen-Age, et, au-delà, celui du « temps » mythique de la Bible. Diplômé d’Oxford puis professeur de philologie, Tolkien possédait une chaire de langue ancienne (vieux et moyen anglais) et de langue et littérature anglaise médiévale à Leeds puis Oxford, jusqu’à sa retraite en 1959. Passionné par cette discipline, qui littéralement signifie « qui aime les langues », Tolkien devint un spécialiste de philologie faisant autorité dans la communauté universitaire mondiale. Il ne pouvait bien sûr pas ignorer les « modes » romanesques qui sont apparus au Moyen-Age, du XIIème au XIVème siècles.
Rappelons que le XIIème siècle voit la naissance d’un genre littéraire nouveau, le « roman ». C’est avant tout le texte narratif d’une autre langue que la langue latine, la langue vulgaire – d’abord utilisée pour des textes de nature hagiographique ou « historique ». Ce premier état de fait linguistique, ce lien avec ces deux genres, va précisément être « retraduit » dans et pour le Monde secondaire. Entendons « traduire » au sens médiéval du terme, c’est-à-dire beaucoup plus proche de l’adaptation et de la « mise au goût du jour » que de la traduction stricte et fidèle. Deuxièmement, les thèmes et les motifs épiques « mis en roman » par les « modernes » de la seconde moitié du XIIème siècle vont fournir le modèle le plus explicite à l’univers tolkienien, alors apparenté aux « gestes ». Pour ces raisons, nous retrouvons dans Le Seigneur des Anneaux particulièrement, les trois « matières » narratives que l’esprit médiéval, enclin à la classification, avait alors isolé :
1°) la matière antique, produit direct de la translatio, qui reprend à son compte les grandes œuvres de l’Antiquité, et situe dans un Orient mythique les aventures de ses héros
2°) la « matière » de France, qui relate les hauts faits de Charlemagne, de ses pairs et chevaliers ; ce sont les chansons de geste.
3°) la « matière » de Bretagne, enfin, qui s’inspire du fonds considérable de légendes transmises oralement par les populations celtiques (dont se nourrissent les romans arthuriens, fondés sur tout ce qui concerne le Graal) : thème de l’Autre Monde, des Iles Merveilleuses et l’absence d’étanchéité entre le monde « normal » et l’Autre Monde (créatures fabuleuses, fées-amantes, cruelles ou bienveillantes, créatures capables de se métamorphoser en animaux), etc.
Par ailleurs, nous aurons l’occasion d’illustrer dans notre étude, le fait que Tolkien aille même jusqu’à imprégner son œuvre de la distinction consécutive à la classification ci-dessus (très vite insuffisante) – distinction certainement non perçue par les lecteurs médiévaux mais uniquement des critiques : à savoir celle établie entre roman courtois et roman non courtois, dit « réaliste ».
Autre reflet, particulièrement fécond pour l’écriture du Legendarium : le texte tolkienien emprunte aux textes narratifs en langue vulgaire leur soif encyclopédique, qu’eux-mêmes avaient empruntée aux sommes didactiques ou religieuses du XIIIème siècle – avec lesquelles l’œuvre tolkienienne entretient également un lien. Pour cette raison, pendant quatorze années, Tolkien a créé à partir d’une œuvre unique, Bilbo, le « cycle » du Seigneur des Anneaux (auquel il ajoute les « suites », du Silmarillion, aux Contes et Légendes inachevés, Premier / Deuxième / Troisième Age référence historico-temporelle du Seigneur des Anneaux). Ultérieurement, au XIVème siècle, cette littérature servira à son tour de « matière » première pour la rédaction de sommes historiques. Or, c’est ce que « représente » le cycle tolkienien pour le Monde secondaire (de l’Histoire divine – Silmarillion – à de la création jusqu’à l’histoire de la Guerre de l’Anneau et l’avènement du Quatrième Age en Terre du Milieu – Seigneur des Anneaux). En dernier lieu, le texte tolkienien accordera une place prépondérante à l’écho de la « grande rhétorique » du XIIIème siècle, autrement dit au triomphe de la poésie formelle. Non en tant qu’héritière des « artes poeticae » des rhéteurs latins, mais en tant que représentative de deux générations de poètes qui, en langue vulgaire, firent systématiquement appel aux « figures » et aux tropes, notamment ceux qui permettaient l’allégorie ou l’invective. Les modes poétiques employés servaient à entremêler des passages en prose fournissant la glose de leur pensée et des strophes, la concentrant sous une forme figurée : l’intérêt tolkienien pour ces « modes » romanesques l’affile ainsi à cette impression d’alors d’user au mieux des ressources de la langue dans ses différents registres. Point capital dans l’interprétation de son œuvre comme nous l’illustrerons plus tard.
La « matière médiévale » du roman tolkienien rappelle également l’importance accordée à la forme des œuvres poétiques, à tous les niveaux. Or ces thèmes et ces figures (l’allégorie entre d’autres) étaient réunis dans une même optique : celle de glorifier la morale chrétienne ; en résumé, par ces emprunts, Tolkien peut assurer à son « cycle » une continuation « naturelle » entre modèle romanesque médiéval et récit biblique. Un glissement s’opère alors entre l’autorité du modèle premier sous lequel se place le texte tolkienien et la seconde (la Bible), en reflet constant dans les œuvres médiévales, même profanes. L’emprunt des « modes » romanesques inventés ou reproduits au Moyen-Age, de ses motifs à ses formes littéraires, assure la reproduction « intacte » des interactions déjà présentes en elle, sur le texte mimétique. Autrement dit, le roman tolkienien profite des ces interactions pour servir son propre principe de cohérence : le projet de mimésis du récit « sacré » des trois religions monothéistes, le récit biblique. Cette intertextualité, au sens que Julia Kristeva a donné à ce terme, est donc particulièrement enrichissante pour ce projet d’écriture. Elle indique le « modèle » à imiter. C’est la raison pour laquelle Tolkien emploie l’expression de « sous-création », en référence (révérencieuse) à son projet littéraire d’imitation du récit biblique : récit « sacré » de la « Création » de la terre, de l’homme et de l’histoire universelle par le Dieu biblique.
Tolkien, bien qu’apparemment enclin à l’« infantilisme », au traditionalisme, voire à une nature « réactionnaire », discourt, et surtout illustre et représente, pour donner à penser et surtout pour convaincre à penser. Selon lui, l’Enchantement du lecteur ne peut s’effectuer que si et seulement si ce dernier témoigne d’une « créance secondaire » envers son univers et l’histoire de cet univers. Cela signifie qu’il doit totalement s’évader de son statut d’individu ancré dans le monde réel. Il ne doit plus se sentir soumis à la linéarité du temps chronologique, qui conduit inéluctablement l’individu de sa naissance à sa mort. Il va donc s’agir de s’évader des lois physiques coercitives de la réalité, de ses normes aliénantes, de son histoire et, surtout, donc de son temps. Le lecteur est convié à suspendre son jugement rationnel quotidien le temps de la lecture afin que ce qu’il lit lui paraisse comme « vraisemblable » voire « vrai », et surtout comme « présent » (ou « contemporain »). De façon particulièrement excessive chez Tolkien : « Le livre modèle le lecteur, le fait entrer sous son autorité du sens impératif qu’il met en scène et démontre, en fait jouir, fait jouir de cette soumission dans laquelle il tient. »
En résumé, cela revient à introduire un clivage entre le règne de l’esprit (temps de lecture) et celui de la matière (temps chronologique), dichotomie consubstantielle à nombres de religions à travers le monde. Telle est également la première fonction de l’intertexte biblique : il va servir de modèle à cette conception « transcendantale » au sens strict, de l’œuvre littéraire. La doctrine chrétienne au sens large soutiendra l’essence même de la « sous-création », à savoir un système-monde qui pose l’existence d’une réalité supérieure à celle qui s’offre littéralement à l’expérience de la lecture : celle de l’existence d’Ilúvatar ou Eru, créateur unique du cosmos secondaire, dont Le Silmarillion nous narre l’histoire.
Un Dieu unique, Eru ou Ilúvatar, a créé des êtres surnaturels, les Ainur, puis le monde qu’ils devront gouverner, Arda. Les « Enfants d’Ilúvatar », créés par lui seul et placés sous la garde des Ainur ou Valar (Seigneurs d’Arda) sont les Elfes ou Premiers-Nés et les Humains ou Seconds-Nés, Le Silmarillion va donc être le plus explicitement analogique au texte biblique. Il constitue donc la clé de voûte de la théologie que Tolkien va inventer pour son monde à partir du Modèle chrétien. Dans cette perspective, Le Seigneur des Anneaux assurera la continuité logique de cette théologie, et davantage, sa permanence ou constance. Notre étude consistera premièrement à offrir une clé d’interprétation de cette « rêverie » tolkienienne, créée à partir d’une conscience immédiate du monde d’après-guerre et pourtant si imprégnée de « matière » médiévale et, plus largement, d’idéologie et de théologie chrétiennes. Nous nous intéresserons finalement à la coupure épistémologique qu’opère cette littérature, qui se démarque par rapport aux discours antérieurs portant sur les mêmes domaines : la « Faërie » (état dans lequel les fées ont leur être) et notre monde, autrement dit sur l’irréel et le réel.
En effet, la littérature tolkienienne clôt la divertissante rêverie onirique pour fonder son propre discours théorique et esthétique, bref, littéraire, au-delà de la nomenclature générique (Fantaisie). Nous analyserons les choix de l’auteur (et leur sens) pour mettre en lumière le décalage entre temps linéaire et temps « mythique » (inspiré de la Bible). Chez Tolkien, ce décalage correspond en réalité à celui entre ce que l’homme vit et ce qu’il a conscience de vivre. C’est dans cette perspective que deux œuvres critiques seront déterminantes dans notre propos, l’une appartenant au domaine de la sémiotique littéraire et l’autre au domaine de la sémiotique mythique (la mytho-critique). La première est celle du belge Georges Poulet, apôtre de l’analyse structurale avec Barthes et Genette, dont les Etudes sur le temps humain traitent précisément des différentes modalités de la conscience de la temporalité et de leur expression dans les œuvres de la littérature européenne (du Moyen-Age à Sartre). La seconde est celle du roumain Mircea Eliade (1907-1986), spécialiste de l’étude comparatiste des religions. L’œuvre d’Eliade a présenté, pour la première fois, l’unité des diverses religions du monde en désignant leurs caractéristiques communes : chaque religion représente un modèle cosmogonique de l’univers, un « système-monde », et l’« homo religiosus », l’« homme religieux », ne cherche pas à reconstituer l’histoire événementielle, mais construit une histoire sainte, dans laquelle l’origine de sa civilisation est interprétée par des mythes fondateurs. Notons que l’« homo religiosus » se distingue de l’homme areligieux, qui refuse toute transcendance. Or telle est la première clause du contrat de lecture tolkienien. Elle suppose que l’esprit du lecteur soit « ouvert » à la transcendance que fonde le récit romanesque, afin de pouvoir s’évader des frontières du monde réel et s’enchanter dans l’Imaginaire.
Or, la principale caractéristique de la conscience religieuse traditionnelle est l’absence de toute frontière nette entre le monde spirituel et le monde naturel, et donc entre l’esprit humain et l’environnement. Telle est la première remarque d’Eliade, à partir de ses études sur les religions chez les Polynésiens ou en Afrique. En résumé, le lecteur doit se comporter en « homo religiosus » face au mythème qui se présente à son esprit. Entendons par « mythème », terme de l’analyse structurale, l’ensemble élémentaire des relations, des compositions (analogiques ou antithétiques) qui vont permettre à la sous-création de décrire, de la façon la plus pertinente et la plus « spectaculaire », la structure du « mythe » littéraire de Tolkien. Cette structure doit être mimétique de celle des religions du monde réel, et notamment de la religion chrétienne. Pour y parvenir, elle doit par conséquent être d’une nature foncièrement permanente. C’est en ce sens que nous parlerons de « création continuée », expression empruntée à Georges Poulet pour caractériser la perception médiévale du temps, de l’homme, du monde et du Dieu biblique, origine de toutes choses. Au Moyen-Age, le monde est avant tout création de Dieu, qui du néant fit apparaître la vie cosmique, humaine, animale et végétale :

En un sens, les existences continuaient à chaque moment d’être créées, non que Dieu en chacun de ces moments s’obligeât de les créer à nouveau, mais parce qu’en tout leur champ existentiel c’est de la même action créatrice qu’elles continuaient de recevoir l’être. […] Soutenue par la continuité permanente de la forme substantielle, se déroulait donc la continuité mouvante du temps ; si mouvante et si fluide qu’il était impossible d’y distinguer des moments consécutifs.

L’apport chrétien primordial à la création tolkienienne consiste en cette notion de « création continuée » : l’action divine, la grâce de Dieu assurait à l’homme médiéval un état de permanence et de conservation dans sa durée, qui ne se distinguait pas de son existence. Cette coïncidence entre nature et surnature, assurée par le secours divin fondait la permanence tant de la créature que de son activité substantielle. Tel est le concept fondamental repris par Tolkien pour sa création, le phénomène reproduit par l’intermédiaire du dieu fictif, Eru. Ce dernier sera le garant de la présence continue des formes naturelles en Arda et de la réalisation des créatures dans le temps. C’est précisément cet acte imprévisible par lequel Eru fait qu’en chaque moment chaque Ainu, Elfe, Humain ou Nain existe qui deviendra une ligne de conduite de l’écriture. Car, en reflet de ce personnage totalitaire, transcendant, omnipotent et omniprésent, se dessine la fonction de l’auteur lui-même. Pour que la structure de son « mythe » imaginaire soit permanente, l’auteur va devoir y rattacher une multitude de tendances d’ordres divers. Au-delà des réseaux strictement formels (linguistiques, grammaticaux, rhétoriques et sémiologiques), nous trouverons des réseaux imaginaires théologiques et socio-historiques. La création continuée que désire mettre en œuvre en Tolkien reposera lors sur la convergence des tous ces réseaux vers un seul et même point : l’herméneutique de l’œuvre par elle-même – du grec « hermeneuein », « interpréter ». Au-delà du discours proprement textuel, l’auteur va insérer des règles semblables à celle qui régissent l’interprétation des Ecritures.
La permanence de la substance de l’œuvre littéraire repose en résumé sur cette sorte de « science » tolkienienne de l’interprétation des textes (Silmarillion, Bilbo, Seigneur des Anneaux), des symboles et des signes qu’ils contiennent en deçà ou au-delà de leur nature romanesque et fictive. Voici sa stratégie d’auteur pour fixer le sens de son œuvre. Un rapport « vital » lie par conséquent l’interprète à ce qui est interprété, même si cela n’est pas seulement du texte (du « récit pur » ou « diégésis »). Voici tout l’enjeu du « mythe » que Tolkien nous présente : il doit apparaître au lecteur comme auto-référentiel, autonome et « vrai ». Son existence se concilie avec une durée propre à la sous-création, continuée. Ceci est la première condition de l’écriture tolkienienne. Elle aboutit à une histoire transposée en un système-monde certes extraordinaire, cohérent et efficace ; mais elle est surtout génératrice d’une œuvre dynamique et mouvante. Ces caractérisations reposent enfin sur le système idéologique pré-existant l’acte de création, système permanent et conservateur à l’instar de son modèle, l’acte du Créateur ou l’action de Dieu, tout à la fois intrinsèque et extérieure à la réalité humaine. Autrement dit, l’œuvre doit « enfermer » le lecteur non pas dans ce monde imaginaire mais dans le cercle herméneutique que le sous-créateur a patiemment élevé autour de l’œuvre. Cette construction ne se situe pas dans les structures purement textuelles (lexique, grammaire, rhétorique), mais elle est perceptible à un niveau méta-textuel, au sens premier du terme (« méta », « au milieu », « à la suite »). Elle représente le discours abstrait au cœur du texte et non à sa surface, qui rend possible la conservation et la réalisation de la création dans le temps. La lecture d’une œuvre comme celle de Tolkien est loin d’être anodine, au sens où elle contient un mode de lecture lui-même mis en abyme : on ne peut croire sans comprendre, mais pour comprendre il faut déjà croire. C’est dans cette perspective que nous nous interrogerons sur la primauté de l’intertexte biblique : nous tâcherons d’expliquer la place et le rôle que ce phénomène occupe dans le projet d’écriture tolkienien et dans la « sous-création », le résultat final. C’est la raison pour laquelle nous privilégierons dans notre méthode d’étude l’approche synchronique à l’approche diachronique.
En effet, la littérature tolkienienne, avant même d’être mimétique du texte biblique (genèse du projet et emprunts isolés), se veut une interrogation sur le monde. En tant qu’objet littéraire, elle contribue, comme tant d’objets artistiques, non pas à simplifier mais à critiquer ou plutôt à problématiser. Dès lors, l’intelligibilité de l’œuvre va naître de la coexistence d’éléments diversifiés : théologiques, idéologiques et littéraires réunis au sein du même ensemble et, surtout, au même moment, tant de l’écriture que de la lecture. A cet instant-là, l’esprit du lecteur aura la possibilité de « voir » entre les lignes la structure sémiotique « cachée » du texte ; autrement dit, c’est alors que tous les systèmes de signes et la théorie générale de l’œuvre pourront transparaître :

L’usager, sous la coupe de lectures infinies, déchiffre dans le texte actuel – remémorisateur des leçons passées – ce qu’il a à être, à son niveau, vu l’état présent de l’Institution. On considère en effet que le texte romanesque est un effet sur le sens idéologique donné.

Il s’agit dès lors de s’immerger suffisamment dans ce monde imaginaire, littéralement « secondaire » pour que la langue choisie par l’auteur se manifeste in toto, pour que le texte devienne non plus une « fantaisie » originale mais le point de convergence de tous les réseaux de signification propres à la Fantaisie (stylistique, rhétorique, idéologique, poétique…).

La théorie comprend dans la description de l’effet romanesque (multiplicateur, totalisateur) son activité positive propre en tant que motivation immédiate dominante, et donc idéologique, de son engendrement. […] Le texte renvoie le lecteur à sa base, à son idéologie, aux données archétypales qu’elle contient, aux impulsions qui l’animent, et l’y conforme en vue de sa propre satisfaction.

Le texte romanesque tolkienien entend démontrer et vérifier son sens idéologique de base, et ce par des détours théologiques et mythiques, afin que le lecteur soit dans un pur rapport romanesque. Tolkien a construit un univers imaginaire dont la structure semble annihiler complètement le champ social de l’œuvre pour qu’elle ne reflète finalement qu’un champ littéraire – en reflet avec l’origine même de la littérature selon l’auteur : la Bible et le « roman » médiéval.
L’écriture tolkienienne se fonde donc sur le projet « totalitaire », celui de créer, au travers d’une œuvre considérable, « le signe d’un signe » : un signe au deuxième degré, à partir de celui de l’écriture scripturaire et après celui du Modèle biblique, le signe de l’œuvre elle-même. Ce qu’invente Tolkien, c’est un univers qui semble lui-même « inventer » sa propre communication, dont il constitue finalement l’objet :

[Le texte] s’entend – de par son activité de texte – comme le réel en cours ; c’est un effet de reconnaissance-méconnaissance dans une relation spéculaire). […] Le texte romanesque accomplit la totalisation du sens d’origine (l’augmentation de ses données idéologiques de base) comme effet du processus textuel lui-même (en son sein et non par emprunt [biblique]. Le sens du texte est un produit du texte et sa finalité.

Comme tout phénomène spéculaire, la réflexivité de ce discours en hors-texte et au cœur du texte (métatexte) ne peut s’opérer qu’en présence d’une source « rayonnante » et d’une surface réfléchissante. Ce seront tour à tour le texte, la Bible ou l’esprit du lecteur. Nous nous intéresserons donc au métadiscours prononcé par le texte, et seulement par le texte. Nous tâcherons de comprendre en quoi ce discours représente, à degré supérieur, le sens même de la pensée qui s’exprime dans l’œuvre – dont nous ne sommes finalement que les auditeurs passifs. Par conséquent, la justification de l’acte artistique et de la création littéraire est mise en jeu dans ce mode de pensée de l’œuvre et dans ce mode de penser l’œuvre. Un mode qui s’authentifie dans un acte de lecture à rebours.
Envisagé à sa juste valeur – littéraire –, l’œuvre se laisse lire dans une perspective de problématisation de ses propres fonctionnements textuels et des choix théoriques qui ont constitué sa genèse. Le texte fonctionne comme un miroir : il suffit qu’une personne physique (ici un lecteur) se confronte à cette surface pour qu’un phénomène spontané et autonome ait lieu : la réflexion que crée le texte produit un « quotient » de lecture interprétative et par là même de théorisation littéraire – signe de la théologie sous-créée par Tolkien. Nous retrouvons dès lors l’idée de transcendantalisme, mais cette fois, elle est associée à l’écriture et non au texte en lui-même : outre la question formelle de la description d’un personnage « absent » et « transcendant » Eru / Ilúvatar), nous étudierons la question théorique et littéraire de la présence d’une réalité supérieure à celle du discours narratif, d’une « connaissance » supérieure à celle qui est à la portée de la raison du lecteur. La doctrine chrétienne de la transcendance de Dieu, en vertu de laquelle Dieu existe en dehors de la nature va être transposée dans le cadre de l’œuvre littéraire : l’idée de Dieu va devenir le principe fondamental sur lequel repose tout l’enjeu sémiotique et esthétique de l’œuvre.

Mon œuvre a échappé à tout contrôle, et j’ai produit un monstre : une aventure d’une longueur immense, compliquée, plutôt triste et même terrifiante, ne convenant pas du tout aux enfants (et peut-être à personne).

Le Dictionnaire Latin-Français de F. Gaffiot offre, à l’entrée « monstrum, i, n » ces acceptions : « fait prodigieux [avertissement des Dieux] », « tout ce qui sort de la nature, monstre ». Le « sous-créateur », « qui monstra narrat », se prénomme par conséquent de la sorte par référence au Dieu « primaire », de façon évidemment modeste, non orgueilleuse, voire révérencieuse vis-à-vis de cette Autorité supérieure. Chrétien de Troyes n’en faisait pas moins devant sa protectrice, Marie de Champagne. L’originalité était mal accueillie au Moyen-age où le poids de la tradition était considérable. De plus, se placer sous la protection d’une autorité était sécurisant car les auteurs étaient peu reconnus. C’est pourquoi Chrétien de Troyes, par un éloge simple, inaugure un acte décisif dans l’histoire de la littérature. Par des astuces de style, il parvient à revendiquer sa création, son originalité, bref, sa signature au moment où les auteurs n’hésitaient pas à se dissimuler sous un grand nom de la tradition romane.
Chrétien de Troyes place la protectrice au rang de « Dame », mais son vocable courtois n’est que le voile jeté sur son réel discours : il indique qu’il a créé une œuvre, d’un genre nouveau. Tolkien usera du même principe pour mettre en valeur le caractère foncièrement « nouveau » de son œuvre. Au(x) fil(s) de ses prologues, surtout celui du Chevalier à la charrette, le poète déclare lui devoir la « matiere » et le « sen » (« sens ») de l’œuvre, l’ensemble étant la « conjointure ». Chrétien de Troyes emploie très tôt ce terme pour qualifier la composition précise qu’il a volontairement donné à son œuvre. Pour la première fois dans l’histoire de la littérature, la structure devient complexe grâce des répétitions incessantes, à des échos symboliques et à une binarité dynamique et significative. Pour la première fois, un auteur tient à ce que le lecteur soit autant attentif à la « matière » qu’au « sen ». C’est avec lui que la composition littéraire possède autant de valeur que le sujet lui-même. Le sujet et la forme deviennent alors inséparables de la structure et ces trois éléments acquièrent une valeur identique. Il devient alors évident que le prologue est un discours laudatif (et ici intéressé), qui dissimule l’ambition de l’auteur. Implicitement et discrètement sont affirmés en réalité l’originalité et le talent personnel de l’auteur, qui se plie en fait aux contraintes hiérarchiques de l’époque. Chrétien de Troyes veut échapper au projet imposé par Marie de Champagne. D’une part, il respecte l’incontournable trame courtoise. D’autre part, il met en œuvre ses propres réseaux sémantiques afin de plonger l’auditeur dans un univers mystique, où une fusion avec le divin s’opère . En résumé, l’œuvre de Chrétien de Troyes peut être qualifié de roman de chevalerie et de roman courtois, mais cette matière était destinée à satisfaire son mécène. Parallèlement, il a créé une structure mystique dans le cadre de la recherche de soi. Ceci fonde la structure originale et ambitieuse de son œuvre, destinée à établir une véritable dignité chez l’auteur et une prise de conscience individuelle alors en germe.
Telle est précisément l’attitude de Tolkien qui se nomme « sous-créateur ». Chrétien de Troyes comme Tolkien voient leur projet doublé par la même connotation religieuse, chrétienne. Compte tenu des huit siècles d’histoire littéraire qui les sépare, la raison de cette connotation sera bien entendu distincte selon les deux auteurs, même si leur univers imaginaire respectif repose sur le même caractère « mystique ». Evrat, qui a traduit la « Genèse » dit que « Dieu a mis de la conjointure » : c’est lui l’initiateur de la matière et du sens cosmique du monde réel, primaire. Ce créateur, unique, a donné par son Verbe, un sens au chaos originel, Or, telle est précisément ce qu’a accompli Tolkien, en tant que sous-créateur du Monde secondaire. Nous restreindrons ici la définition de « sous-créateur » en regard de l’incroyable cohérence de cet univers imaginaire, pour lequel l’auteur a inventé une situation cosmique, géographique et historique particulières, mais aussi des êtres extraordinaires, voire même des végétaux originaux comme par exemple « l’athelas », fleur médicinale des Elfes.
Auteur du XXème, Tolkien ne saurait devoir à aucune autorité supérieure, mécène ou dieu, son inspiration et le résultat final, bref, la « conjointure » de son œuvre. Ces incessantes références à l’œuvre de création du Dieu chrétien ne servent que l’illustration du « sens », de l’idéologie de son œuvre littéraire, bien entendue personnelle. Tolkien n’est ni un mystique ni un catholique prosélyte. Il n’a pas créé une œuvre d’inspiration dévote, mais une idéologie littéraire que sert l’essence « chrétienne » du Silmarillion et du Seigneur des Anneaux : elle figure bien moins un fonds moral et didactique qu’une véritable technique romanesque telle que le « roman » de Chrétien de Troyes l’a innovée ; à savoir premièrement l’actualisation du temps sacré biblique dans le récit narré, dont la structure temporelle se trouve ainsi modifiée, de façon constructive – point d’étude de l’analyse structurale de Georges Poulet et de la mytho-critique éliadienne (dichotomie temps sacré / temps profane). Au-delà de cet emploi réservé à la production romanesque stricte, l’intertexte biblique va permettre une resémantisation des mythes chrétiens par la sous-création : c’est-à-dire que les unités « lexicales » explicitement empruntées à la matière chrétienne vont être assimilées à un autre « sens » que celui conféré par cette doctrine, un sens implicite totalement propre au texte tolkienien, à la « vérité » de son « mythe vrai ».

Ce que le roman affirme au niveau explicite du texte (à savoir sa vérité) se trouve vérifié (fictivement) au niveau de l’intention implicite (structurale), n’existe qu’afin de couvrir son opération réelle. Loin d’accomplir ce qu’il paraît s’assigner à lui-même comme tâche (l’imitation), le roman constitue la vérité à laquelle il est censé se conformer et vérifie sa propre fiction.

Ce mouvement de resémantisation que va opérer « l’imitation » sera « poétique », au sens où il va s’élaborer en rapport avec « l’art du langage », proprement tolkienien. Il se construira au fur et à mesure de la mise en jeu au sein du récit de toutes les ressources de la langue, que Tolkien « aime » si passionnément, afin de créer pour le lecteur un « pur » spectacle d’Enchantement, à la fois sensible et intellectuel, L’optique finale de l’écriture sera de créer un « spectacle », de monter une représentation, qui dans sa continuité et dans sa permanence, légitimera finalement sa propre nature littéraire – accès cette fois à la permanence de la lecture, à travers la notion de « postérité ».
L’objet de notre étude consistera à mettre en lumière l’art tolkienien de l’éloquence, autrement dit la mise en œuvre des procédés stylistiques et structurels permettant l’expression de l’œuvre sur son propre statut (« mythe vrai »). A partir de là, l’enjeu de notre propos sera d’illustrer plus précisément l’art tolkienien du « dialogue ». Ceci nous renverra à la fonction logique et discursive du texte-même, qui procède de deux phénomènes : d’abord la médiation intertextuelle de raisonnements divers, puis le discours de la pensée qui s’exprime par le texte, bref, l’art du dialogue de l’œuvre seule, et non plus du sous-créateur et de ses références personnelles. Ainsi douée d’esprit et de langage, à un second degré, l’œuvre pourra entendre justifier sa caractérisation de « mythe vrai », foncièrement poétique, au sens originel du terme. En résumé : comment la rhétorique et la dialectique tant textuelles que métatextuelles de l’œuvre parviennent-elles à concilier le temps biblique et le temps mythico-poétique de l’écriture ? Autrement dit, comment la coïncidence entre le discours et le métadicours de l’œuvre peut-elle aboutir à une [sous-]création continuée ?
Afin de répondre à ces interrogations, nous devrons dans un premier temps comprendre pourquoi cette « matière » chrétienne n’est pas une simple technique romanesque, une sorte de toile de fond ; mais au contraire, un principe logique discursif et métadiscursif de l’œuvre en tant aussi que « sens » (« sen »), c’est-à-dire, de signification morale certes, mais surtout de réflexion esthétique que l’on apporte à la « matière », afin de former une « conjointure » – à l’instar de Dieu qui « a mis de la conjointure », qui a donné sens à l’existence du monde et de l’homme. En s’orientant vers une perspective de « situation » poétique, l’écriture de la « sous-création » s’orientera vers le champ d’une théorisation littéraire, que nous mettrons en lumière. La stratégie de Tolkien consistera alors à mettre en abyme son œuvre de sous-créateur. Le récit de la Guerre de l’Anneau est censée avoir été écrite par Frodo, à la fin de ses aventures – poursuivant en cela la grand’œuvre de Bilbo. C’est le Livre Rouge, qui deviendra le Livre de Thain, sa première copie, annotée par les Elfes .

This account of the end of the Third Age is drawn mainly from the Red Book of Westmarch. […] It was in origin Bilbo’s private diary, which he took with him to Rivendell. Frodo brought it back to Shire, together with many loose leaves of notes […], he nearly filled its pages with account of the War.
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C’est sur cette illusion que reposeront tous les reflets du champ intertextuel considérable de la sous-création. C’est sur cette illusion que reposera tout le projet mimétique de l’écriture tolkienienne : ce Livre devra être au Monde secondaire ce que la Bible est au Monde primaire, pour un monothéiste. Ce Livre devra le récit « sacré » correspondant au « mythe vrai » qu’est la sous-création. Du succès de ce reflet dépend la légitimation de l’expression « sous-créateur ».Ensuite, il s’agira de saisir le sens et la place stratégique de cette métatextualité de la Fantaisie tolkienienne dans le projet de « mimésis » que fonde son œuvre : celui de reproduire la Bible, le Livre du Monde, pour citer cette catachrèse, formé de la main de Dieu pour certains, « somme » du savoir et de l’expérience humains pour d’autres. Ce que va proposer la sous-création est une imitation la plus « naturelle », « vivante » et « magique » possible dans ce que notre monde a de plus naturel, vivant, magique ou sacré pour un « homo religiosus », et particulièrement pour un chrétien.
En résumé, le texte va reproduire initialement l‘obsession chrétienne de la mort, base de cette religion, afin d’en extraire toute la « matière » théologique consécutive, à laquelle il faudra emprunter également ses fonctions « réellement » mythiques. Ceci nous conduira au cœur de la conception tolkienienne du langage et de ses potentialités ou « pouvoirs » dans la lutte contre la Mort. Enfin, nous tâcherons de comprendre en quoi les fonctions faëriques d’« Evasion » ou de « vacance » correspondent en fait à ces fonctions mythiques, dont la première est celle du « retour aux origines ». Grâce à de multiples procédés d’écriture, l’œuvre littéraire entend-elle opérer véritablement un retour aux origines de ce qui constitue pour son auteur les origines de la pensée et de la littérature occidentale ? Que signifie pour le texte ce retour à ses propres « origines » ? Telle sera le dernier axe de notre étude : la fonction esthétique du mouvement de « retour » et de « progrès » de l’écriture et de la lecture, depuis son Idée originelle jusqu’à son épanouissement tolkienien, original. Fonction qui assurera la stratégie métatextuelle de Tolkien dans son ensemble, à savoir le langage mythico-poétique de la sous-création, que nous résumerons sous cette expression : l’illusion glossolalique du texte tolkienien.

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